L'Entreprise Individuelle (EI) et l'Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée (EIRL)

Quelles différences entre une Entreprise Individuelle (EI) et une Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée (EIRL) ?


1. Définitions


L’entreprise individuelle (EI) n’ pas de patrimoine affecté limitant le gage des créanciers,

L’entrepreneur est responsable des dettes du faut de son activité de manière infinie sur tous ses biens personnels.

Toutefois, depuis la Loi dite « Macron » du 6 août 2016, la résidence principale est insaisissable de droit et il est également possible d’effectuer une déclaration d’insaisissabilité auprès d’un notaire sur les autres biens fonciers de l’entrepreneur non affectés à l’usage professionnel. De plus, seul l’entrepreneur peut être le dirigeant.

L'entreprise individuelle ne crée pas de personnalité juridique distincte de l'entrepreneur qui exerce donc son activité en nom propre.  

​​L’entreprise individuelle à responsabilité limitée (EIRL):

Le régime de l’EIRL est très similaire à celui de l’entrepreneur individuel.

La principale différence résidera dans la création, en même temps que la structure, d’un patrimoine professionnel distinct qui permet de protéger le patrimoine personnel de l’entrepreneur. 

La création est également très simple, car elle se fait par la simple déclaration auprès du centre de formalités des entreprises (CFE) qui se charge lui même de toutes les démarches auprès des organismes concernés.

De plus, l’EIRL pourra choisir, sous certaines conditions, l’imposition sur les sociétés (IS) plutôt que l’imposition sur le revenu et même le régime avantageux de la micro-entreprise.

En contrepartie, l’EIRL devra ouvrir un compte professionnel distinct et réaliser des obligations comptables annuelles simples (livre journal, grand livre et livre d’inventaires uniquement).

​Par ailleurs, l'EIRL ne crée pas de personnalité juridique distincte de l'entrepreneur qui exerce donc son activité en nom propre.  

Suppression des EIRL pour l’avenir - Loi 2022-172 du 14-2-2022 art. 6 : JO 15 texte no 2 : Voir article publié.

2. L’entreprise individuelle (EI) dépassant les seuils de la micro-entreprise


2.1 Caractéristiques générales de l’entreprise individuelle:

  • Qui peut être entrepreneur individuel ?

Une personne seule qui souhaite exercer une activité indépendante commerciale, artisanale, libérale ou agricole.
Pour rappel, les règles décrites ci-après concernent les Entreprises Individuelles dont le Chiffre d’Affaires (CA) annuel dépasse 176.200 € HT pour les activités commerciales ou 72.500 € HT pour les activités de services.
  • De quel Centre de Formalités des Entreprises (CFE) vais-je dépendre ?
Si l’activité est commerciale ou consiste à fournir des prestations de services, le CFE sera celui de la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI).
Si l’activité est de nature artisanale, ce sera le CFE de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat.
Si l’activité est libérale, l’URSSAF sera compétente.
  • Existe t-il des inconvénients majeurs au statut d'Entrepreneur Individuel ?
Même si vous ne faites pas de Chiffre d’Affaires (CA), vous payez quand même des charges dans le vent, donc prudence…
Ensuite, les charges sociales sont calculées sur votre rémunération et sur votre résultat, ce qui peut faire très mal si ces 2 montants sont élevés.
Puis, vous engagez votre patrimoine personnel en cas de défaillance (en EIRL, le risque est limité au patrimoine affecté).
Enfin, si vous êtes certain de vous développer rapidement, autant ne pas immatriculer d’Entreprise Individuelle mais directement une société pour limiter les frais.
  • Puis-je passer en société si mon activité se développe ?
Oui, c’est même très conseillé.

En fonction des options choisies (fermeture, apport, cession).
La plupart des entrepreneurs ferment leur EI et créent une société derrière avec la même activité. C’est l’option qui procure le moins d’avantages, mais qui coûte également le moins…

Il est aussi possible d’apporter le fonds de commerce ou artisanal de l’EI à une société.
L’apport a pour effet de transférer la valeur du fonds au capital de la société créée sans mouvement d’argent ; c’est simplement une écriture comptable.

La vente, quant à elle, va permettre à l’entrepreneur – qui sera vigilent face à l’éventuelle plus value dégagée – d’obtenir du cash en vendant son fonds à la société qu’il pourra diriger et ainsi récupérer le prix personnellement.
De bons conseils sont la clé pour créer des avantages importants lors du passage en société ; il ne s’agit pas que d’une évolution de la structure, mais également d’optimisation à plusieurs niveaux.

2.2 Le régime social de l’entreprise individuelle:

  • Comment ça se passe pour les charges sociales à payer ?
Si le chiffre d’affaires est nul, vous paierez quand même des charges! C’est un forfait qui peut s’élever à environ 140 € par mois.

Si vous déclarez un chiffre d’affaires, vous paierez en moyenne 47% de charges dessus, hors première année ou ACCRE (votre bénéfice sera également soumis à cotisations).

La première année de cotisations est souvent indolore puisque les montants appelés ne le sont pas sur vos chiffres réels mais sur un forfait très bas.

Par conséquent, lorsque la régularisation des charges tombe l’année d’après (ou 2 ans après si c’est la première année d’activité), ça peut faire très mal… Surtout que vous allez non seulement payer pour l’année d’avant mais aussi sur l’année en cours prenant en compte vos bons résultats de N-1.

Si vous ne voulez pas avoir de sueurs froides à chaque courrier, provisionnez vos charges : quand vous prenez 100 de rémunération, gardez 50 de côté pour la régularisation à venir (sauf si l’ACCRE est active, dans ce cas, 30 en moyenne suffiront).

Faites de même lorsque vous connaîtrez votre résultat de l’année (il est important de comprendre que les charges sociales calculées sur votre résultat se moquent bien de votre trésorerie disponible… prudence donc si le résultat est élevé). N’hésitez pas à vérifier les sommes appelées, les erreurs étant fréquentes… Une bonne nouvelle? Si les prélèvements de l’exploitant sont conséquents, ils bénéficieront tout de même de taux légèrement dégressifs…
  • Quelle protection sociale pour l'Entrepreneur Individuel ?
La couverture sociale du travailleur indépendant est sensiblement inférieure à celle d’un assimilé salarié (par exemple celle d’un président de SAS).

Le taux de cotisation étant plus faible, la protection sociale garantie est évidemment plus limitée.
Certains entrepreneurs préfèrent prendre des assurances complémentaires (maladie, retraite, etc.), afin de palier aux faiblesses de la protection de base.
  • Puis-je bénéficier de l'ACCRE et des droits pôle emploi (ARE ou ARCE) ?
L’aide aux chômeurs créateurs pou repreneurs d’entreprise (ACCRE) qui a pris le nom depuis le 1er janvier 2019, d’ « exonération de début d’activité ». Cette aide consiste en une exonération de charges sociales pendant un an à compter du début de l’activité de l’entreprise. L’aide est réservée aux personnes dont les revenus d’activités pour 2018 sont inférieurs au plafond de la sécurité sociale, soit 39 732 euros. L’ensemble des cotisations sociales (patronales et salariales) est exonéré.

Si le candidat à la reprise bénéficie de l’ARE (allocation de retour à l’emploi), deux possibilités se présentent à lui :
  • Soit, il choisit de l’ARCE (aide à la reprise ou à la création d’entreprise) qui correspond à 45 % du montant du reliquat de ses allocations à la date du début d’activité. Pour être éligible à cette aide, le demandeur doit avoir obtenu l’ACCRE.
  • Soit, il opte pour le maintien de ses allocations alors même qu’il a débuté son activité professionnelle en tant que repreneur d’entreprise ou créateur. Ce cumul constitue ainsi un moyen financier pour accompagner le nouvel entrepreneur.
Le maintien ARE (percevoir son chômage mensuellement) ne nécessite pas d’avoir obtenu l’ACCRE.
Le maintien ARE peut exister pour la totalité des droits ouverts mais votre Chiffres d’Affaires (CA) réduira le montant versé chaque mois par Pôle Emploi.
L’Entrepreneur Individuel préférera donc le plus souvent l’ARCE, aide qui ne prend pas en compte le chiffre d’affaires pouvant être dégagé par l’entreprise individuelle.
En cas de fermeture de l’entreprise, le reliquat des droits ARCE se réactive automatiquement, ce qui est une sécurité.

2.3 Le régime fiscal de l’entreprise individuelle:

2.3.1 Quelle fiscalité vais-je avoir à supporter ?


  • Si votre entreprise individuelle n’est pas au réel, vous ne pouvez donc pas déduire vos charges de votre chiffre d'affaires, ni amortir vos achats de matériel.
En revanche, vous bénéficiez d’un abattement forfaitaire dont le taux varie selon l’activité de votre micro-entreprise. Cette déduction correspond aux frais professionnels que vous avez engagés. Les taux sont les suivants :
  • 71 % pour le commerce (achat et vente) et la location de logements
  • 50 % pour les prestations de services
  • 34 % pour les professions libérales et les prestations de services (BNC)
L’abattement minimum forfaitaire est de 305 €.
Une fois cet abattement appliqué sur votre chiffre d’affaires, cette somme sera ajoutée aux autres éventuels revenus de votre foyer. 
Le chiffre d’affaires brut sera déclaré dans votre déclaration annuelle 2042 C pro et l’Administration appliquera l’abattement ci-dessus.

  • Si votre entreprise individuelle est au réel, vos charges seront alors effectivement décomptées de votre chiffre d’affaires pour le calcul de votre bénéfice.
A vous de voir si vos charges sont élevées (optez pour le réel) ou faibles (optez pour l’abattement forfaitaire).
La Cotisation Foncière des Entreprises (CFE) est due si l’Entreprise Individuelle existe au 1er janvier, quand bien même son chiffre d’affaires aurait été nul l’année précédente. Enfin, si vous ne voulez pas subir 25% de majoration sur votre résultat, pensez à vous inscrire dans une Centre de gestion agréé !

2.3.2 Le régime de la TVA est-il applicable ?


Une Entreprise Individuelle est assujettie à la TVA, ce qui veut dire que vous facturez la TVA à vos clients et la récupérez sur vos achats.
Le Micro-Entrepreneur quant à lui n’est pas soumis à la TVA: il bénéficie donc d’un avantage concurrentiel, puisqu’il ne la facture pas à ses clients personnes physiques, bien qu’il ne récupère pas la TVA sur ses achats non plus.

3. L’Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée (EIRL)

3.1 Caractéristiques générales de l’entreprise individuelle à responsabilité limitée:

  • L'EIRL est-elle si différente de l'EI ?
Non, ce qui est dit précédemment est applicable si l’EIRL n’est pas à l’Impôt sur les Sociétés (IS).
Concrètement, une EIRL qui n’est pas soumise à l’IS est une Entreprise Individuelle qui a fait le choix de limiter le gage des créanciers à un patrimoine défini et non sur l’ensemble du patrimoine de l’Entrepreneur.
L’EIRL démontre qu’il n’est pas toujours obligatoire de créer une société pour bénéficier de l’Impôt sur les Sociétés (IS).
  • Peut-on passer d'EI à EIRL à tout moment ?
Vous pouvez passer d’EI à EIRL à tout moment.
Notez que la séparation de patrimoine entre l’Entrepreneur et son Entreprise Individuelle n’est opposable aux créanciers qu’à compter du dépôt de la déclaration d’affectation.
Il est même possible pour un Micro-Entrepreneur de passer en EIRL.
  • Y a-t-il des obligations comptables précises ?
EIRL doit ouvrir un compte bancaire exclusivement dédié à l’activité de l’EIRL, tenir une comptabilité commerciale et déposer son bilan chaque année au lieu de dépôt de la déclaration d’affectation.

  • Notion de patrimoine d’affectation en EIRL:
Qu'est-ce que le patrimoine d'affectation ?
Ce sont les actifs que l’Entrepreneur considère comme liés à son activité professionnelle. On peut donc y trouver un véhicule, du matériel, une marque, etc. Si l’entrepreneur dépose le bilan, les créanciers ne pourront pas se servir au-delà du patrimoine d’affectation.
Comment évalue-t-on le patrimoine d'affectation ?
Si aucun des actifs ne dépasse la somme de 30 000 €, l’entrepreneur déclare simplement la valeur attribuée sur la déclaration d’affectation.
Si un actif dépasse l’évaluation de 30 000 €, le recours à un Commissaire aux comptes, un Expert-comptable ou une association de gestion et de comptabilité est alors nécessaire.
Tout apport immobilier est évalué par un Notaire et nécessite son intervention pour la publicité foncière.
Peut-on modifier le patrimoine d'affectation ultérieurement ?
Oui, il suffit de le déclarer au Centre de Formalités des Entreprises (CFE) dont vous dépendez. La formalité est simple et peu onéreuse. Si les actifs apportés sont évalués à plus de 30 000 €, il conviendra de recourir aux professionnels ci-dessus indiqués.
Quel intérêt de déclarer un patrimoine affecté de valeur élevée ?               
Vous l’avez compris, le patrimoine affecté constitue le gage des créanciers.
La valeur du patrimoine affecté va aussi vous procurer un avantage notable : si vous êtes à l’IS, les distributions de dividendes seront soumises aux cotisations sociales, sauf sur 10% du patrimoine affecté.
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3.2 Le régime fiscal de l’EIRL:

  • Résumé du régime fiscal de l'EIRL
Comme une Entreprise Individuelle classique, l’EIRL n’ayant pas opté à l’IS suppose de déclarer son bénéfice fiscal au barème progressif de l’Impôt sur le Revenu, selon les règles applicables à l’activité exercée.
A l’IS, le bénéfice est taxé à hauteur de 15% jusqu’à 38 120 € et à partir de 28% au-delà.
  • Opter à l'impôt sur les sociétés, ça change quoi ?
Cette option « transforme » votre Entreprise Individuelle en « mini EURL » de manière irrévocable.
C’est à dire que vous bénéficierez des règles de l’IS, alors même que vous êtes une Entreprise Individuelle.
L’avantage premier est que vos cotisations sociales ne seront calculées que sur la rémunération que vous vous versez (et plus sur le résultat qui sera lui aussi moins lourdement taxé grâce à l’IS).
A l’IS, vous pouvez aussi amortir vos actifs (ex : matériel, véhicule, etc.) au bilan et ainsi créer des charges comptables et fiscales diminuant votre résultat imposable. Votre trésorerie ne pourra que mieux s’en porter.
  • EIRL à l'IS, ça veut dire dividendes ?

Les règles sont « les mêmes » que pour une EURL à l’IS.
Globalement, après imposition de l’IS, vous pouvez vous distribuer les sommes disponibles issues de votre résultat de l’année ou des réserves que vous avez constituées au fil des ans.
Au-delà des 10% du patrimoine d’affectation, vous subirez des cotisations sociales sur les sommes distribuées. Ce n’est donc pas très avantageux et il est conseillé d’augmenter sa rémunération plutôt que de verser des dividendes.